Enfant sorciers: des pasteurs empirent la situation à Kinshasa

Accusés de sorcellerie, des enfants de Kinshasa  passent des moments pénibles dans les rues de la capitale congolaise. Ils sont chassés de leurs familles après avoir été accusés de plusieurs maux. Pour beaucoup de familles, ce sont eux qui font pipi au lit, ils ont un sommeil agité, ils aiment la musique dites « profanes », ils ont des ventres ballonnés et ils impolis. En plus, ils sont accusés d’être à la base des maladies difficiles comme l’épilepsie cardiovasculaires et autres.
Ces symptômes servent désormais à beaucoup de familles kinoises à se débarrasser facilement de certains enfants dits sorciers. Bruce Abuza, 19 ans, est dans la rue depuis plusieurs années. Il a été chassé du toit de son grand frère par la femme de ce dernier qui l’accusait de sorcellerie, alors qu’il avait que 13 ans. C’est un pasteur d’une église dite de « réveil » où priait sa belle-sœur qui avait fait cette révélation. Venant d’un serviteur de Dieu, ces accusations contre le jeune Abuza ont ouvert la voie à sa belle-sœur pour le renvoyer, sous l’œil impuissant de son frère ainé.
Ne sachant pas où se réfugier, Abuza s’est installé dans les rues de Kinshasa avant de réintégrer le Centre d’entraide chrétien de la commune de Kasa-Vubu. « Je ne connais rien de ce qu’on me reproche. C’était une façon de se débarrasser de moi simplement parce que j’étais une charge de plus », explique-t-il d’un air triste.
Plusieurs enfants abandonnés rencontré dans les rues de Kinshasa ont affirmé avoir été renvoyés dans le toit familial, après qu’ils aient été accusés de sorcellerie. Interrogé par direct.cd, Junior Mbubu, un d’eux, âgé de 16 a expliqué : « C’est un pasteur qui a dit à mes parents que j’étais porte-malheur de la famille ». Des cas pareils sont nombreux dans la capitale congolaise.
Alors que l’article 41aliné 3 de la constitution de la République démocratique du Congo stipule que l’abandon et la maltraitance des enfants, notamment la pédophilie, les abus sexuels ainsi que l’accusation de sorcellerie sont prohibés et punis la loi.
Selon les chiffres estimés par le Réseau des éducateurs des enfants et jeunes de la rue (REEJR), Kinshasa compte actuellement de 20 000 à 25 000 mineurs qui mendient, travaillent enfantent et dorment dans ces rues, dont la plupart seraient accusés de sorcellerie. Plus de 7 000 églises sont enregistrées à Kinshasa. Selon les ONG des droits des enfants, ces églises sont devenues un rouage essentiel dans le processus qui mène nombreux foyers kinois à abandonner leurs enfants.
Se basant sur ces raisons spirituelles, ces communautés aux inspirations diverses, ont transformé, en moins de 20 ans, un phénomène restreint en une réalité sociale déplorée par un grand nombre de personnes.
Confrontées à plusieurs difficultés, les familles sont souvent désemparées face aux multiples problèmes qu’elles rencontrent fautes des moyens pour survivre. Pour beaucoup d’entre elles, les églises sont devenues un repère fondamental. Profitant cette faiblesse, certains pasteurs promettent un remède efficace à ces familles en crise. « L’église doit aider la société à aller de l’avant. Il n’est pas mal de détecter un esprit mauvais, mais il n’est pas aussi bon de mettre la vie d’un enfant en danger », dit Jerry Ebanda, pasteur de l’église Assemblée des saints du ciel. En poursuivant : « il y a plusieurs mécanismes pour éviter cela, entre autres la délivrance, la prière… ».
Créé le 20 avril 1991, le Centre d’entraide chrétien (CEC) de Kasa-Vubu a pour mission d’encadrer les orphelins, les vieillards, les sourds et les délinquants. La majorité des enfants encadrés dans ce centre sont victimes d’accusation de sorcellerie. Selon Lazard Kimbuasa, responsable du centre, 3/4 de ces enfants sont faussement accusés de sorcellerie. « Depuis la création du centre, plus de 30 enfants ont été déjà réintégrer dans leurs familles », explique-t-il.
Créé à son tour le 25 août 2015, le Tribunal pour enfant a pour objectif de principal d’éduquer et rééduquer les enfants. En plus, il intervient dans les matières des enfants en situation difficile, en conflit avec la loi, les adoptions tant nationales qu’internationales et les dossiers civils. Depuis sa création, le Tribunal pour enfant a traité plus ou moins 35 cas des enfants dits sorciers. Dans l’affaire de sorcellerie pour enfant, ce tribunal a de la peine pour sanctionner les auteurs. « Dans la matière pénale, avant de prendre une décision on tient compte de preuves, or la sorcellerie est un problème spirituel », fait savoir Nelly Masenga, assistance sociale près du Tribunal pour enfant de Kinshasa /Matete.
Pourtant, face à l’ampleur du phénomène enfant sorcier, l’Etat a mis en place un dispositif légal interdisant de renvoyer dans la rue des enfants pour sorcellerie.
Selon l’assistante sociale, tout le monde est habilité à saisir le Tribunal, même les enfants victimes. Le tribunal pour enfant fait la médiation pour aboutir à la réunification.
« Tous les enfants, qu’ils soient nés dans le mariage ou hors mariage jouissent de la même protection sociale », lit-on dans l’article 25 alinéa 3 de la déclaration universelle de droit de l’homme que la RDC a ratifiée.
Jean-Hilaire Shotsha

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